Vis ma vie de stagiaire
Viiii très chers lecteurs, c'est avec une immense tristesse que je vous annonce que je ne partirai pas sur la côte californienne cet été (trop jeune, trop loin, trop grand, trop d'armes en libre circu, trop de hamburgers…), j'ai donc commencé mon st age en banlieue parisienne. C'est presque autant la classe.
Je suis donc chez C-arre f our (j'éloigne les moteurs de recherche, on ne sait jamais), en pleine zone, et à peine arrivée ai-je pris connaissance de l'élément-clé de la vie active : la machine à café. Non pas que je sois préposée à la distribution du café, fort heureusement parce que j'aurais été capable d'y incorporer les pires horreurs par vengeance, mais parce que c'est bel et bien L'outil de socialisation.
Ainsi, une employée (le personnel est super gentil, c'est pas comme cette pétasse de clientèle, mais nous y reviendrons) m'a proposé de m'offrir un café. N'ayant jamais supporté qu'une personne inconnue consente le moindre sacrifice financier à mon égard, j'ai tout d'abord refusé fermement. Puis l'asociale que je suis a réalisé que c'était très mal vu de refuser ce genre d'attentions, un véritable pied de nez à la fonction d'entrée en communication que remplit la machine à café (par communication, j'entends monologue de l'interlocuteur, et marmonnements indistincts de moua-même. C'est comme ça que je communique). Alors j'ai accepté. Depuis, une question me hante : est-ce que c'est à mon tour de lui offrir une boisson, la prochaine fois ? Je crois que je vais sécher la pause, afin de couper court à cette interrogation. En plus son thé était absolument imbuvable. Elle mériterait que je lui en offre un, tout compte fait. Oui, très bonne idée (il n'y a que sur mon blog que ma conception de la communication est inversée : je monologue, vous marmonnez).
Autre exemple, en revenant de la machine à café, nous sommes allées rejoindre une autre employée qui revenait elle-même de la machine à café (je vous l'avais bien dit, c'est L'objet fédérateur d'une entreprise. En même temps s'il faut s'infliger un thé lyophilisé par jour pour avoir des amis, je préfère rester seule et mal-aimée). Cette employée, je l'aime bien parce qu'elle est ambiguë avec moi. Quand elle me parle, elle se met à 3cm de moi, quand elle me croise, elle me jette un regard comme dans la chanson des yeux revolver. Enfin comme dans le clip (même si j'ai jamais vu le clip) c'est une image mentale disons. Bon le truc tue-l'amour, c'est qu'elle a un accent polonais ou russe ou slovaque enfin un accent bizarre tout pourri. Et le truc encore plus tue-l'amour, c'est que ce fameux jour, après que je me sois assise à côté d'elle et qu'elle ait collé sa chaise à la mienne tout en croisant les jambes de manière à ce que sa jambe supérieure empiète sur mon espace frontal et se colle presque à mes jambes, elle me demande "dis Novo, tu sais ce qui est arrivé à Céline Dion ? Elle n'arrive plus à chanter, elle a un problème avec sa voix ?". Bamm, je tombe de haut. Au moment où j'allais répondre que si Céline Dion a perdu son organe, c'est une excellente nouvelle pour l'humanité, une petite voix me dit que je ne suis pas assez familière avec cette dame pour me laisser aller à ce genre d'impertinences. Et puis on ne sait jamais, peut-être qu'elle pourrait faire en sorte qu'on me sucre mes tickets resto auxquels je n'ai pas droit, mes remboursements de transports auxquels je n'ai pas droit, ou ma rémunération à laquelle je n'ai pas droit.
Ce qui m'amuse aussi beaucoup, c'est de voir les réactions du personnel lorsqu'une nouvelle livraison arrive (je suis dans le secteur tex$ tile) : morceaux choisis :
-"Mais c'est vraiment horrible, y'a des gens qui achètent ces trucs-là ?"
-"Ouais, et 35€ en plus"
… ou les techniques d'écoulement du stock :
-"C'est des vestes qu'on a depuis trois ans, elles sont tellement moches qu'on sait pas quoi en faire. Soit on les revend à -75% pendant les soldes, soit on les renvoie au fournisseur. Je crois qu'on va faire les deux dans l'ordre, et il se trouvera toujours des gens de très bon goût pour nous en débarrasser"
-"On va faire des réductions là-dessus pour écouler, normalement on n'a pas le droit en dehors des soldes puisqu'on vend à perte mais bon...Si on le fait pas, ça occupera de la place indéfiniment, alors que les gens sont prêts à acheter les pires merdes si c'est pas cher"
Et justement, les clients parlons-en. Je suis dans une zone où ils sont très très spéciaux. Non seulement ils sont complètement barges, mais en plus ils sont malhonnêtes. D'ailleurs, Carr - e!four classe ses magasins en catégories selon le nombre de vols. Je suis en catégorie 4, la plus élevée.
Je pourrais vous parler de celui qui vient se faire rembourser ses chaussons, chaussons qu'il a achetés un an auparavant, ou de celle qui nous tient la jambe pendant 10 mn parce que "je ne comprends pas, je ne peux pas essayer ces culottes, mais en plus elles ne sont pas remboursables, il y a quelque chose qui ne va pas dans cette logique, non ? Vous ne croyez pas ? Hein ? Non parce que si elles ne me vont pas, je ne le saurai pas, mais dans ce cas, je ne pourrai pas me faire rembourser. Il y a un petit problème, vous ne pensez pas ?"
MAIS CONASSE, SI TOUT LE MONDE POUVAIT LES ESSAYER, IL NE TE VIENDRAIT MEME PAS À L'IDEE DE LES ACHETER.
Mais il y a surtout les bordéliques qui ne sont pas foutus de remettre les choses en place, et dans l'état dans lequel ils les avaient trouvées. Et dans le tex[ tile, c'est TRÈS énervant.
Vous ne vous êtes sûrement jamais demandé ce que pensait la personne à côté de vous en train de ranger les trucs sur les cintres, pendant que vous faisiez vos courses. Et bien je vais vous le dire : "Toi t'as pas intérêt à me déplier ce pyjama que j'ai mis un quart d'heure à ranger correctement. NOOON TU TOUCHES PAS ! Je te promets que je peux devenir méchante. Conaaaassssssse, maintenant tu replies et plus vite que ça. Non pas comme ça putain, t'as pas observé comment c'était ? Tu veux prendre ma place peut-être hein ? Mais tu le fais exprès ou quoi ? C'EST PAS LÀ QUE TU L'AS TROUVÉ TRIPLE COURGE DE TA MÈRE !! Grmmmmblblbmlgrrr"
Au moins, ce stage m'aura permis de savoir pourquoi je fais des études supérieures : pour ne pas faire de la mise en rayon, nom d'une pipe.
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