30 mars 2006

Foulqu** them all

On croit être définitivement guérie, on croit avoir définitivement intégré l'idée qu'elle est plus charlatan que génie, qu'en fleurissant les paroles de ses chansons, elle arrive à masquer le fait que les similitudes avec du Priscilla sont étonnamment tangibles, que ses tics sont insupportables et que tout le soin accordé au contrôle de sa parole est fatigant, à force.

Et puis on tape "Mylène Farmer" dans la barre de recherche de Dailymotion, juste par curiosité, pour regarder des passages télé qu'on aurait manqué, alors qu'on avait atterri sur ce site par hasard en cherchant des vidéos de guitaristes. Et on tombe
là-dessus. Et tout d'un coup, tous les souvenirs d'une époque où on la vénérait nous retombent dessus sans prévenir.

On se remémore les nuits blanches qui précédaient la moindre de ses apparitions télé, le cœur qui battait à 100 à l'heure dès qu'on entrapercevait l'une de ses mèches folles, les tremblements d'impatience en revenant chez soi après avoir acheté un nouveau CD à la FNAC, ses clips qu'on se repassait en boucle avec délectation, la correspondance par table interposée au collège tous les jeudis matin pendant l'intégralité du cours de latin avec une autre fan dont on n'a jamais connu l'identité, les heures passées sur internet à exploser le forfait 10h pour tout connaître d'elle, lire des milliers de pages web à l'affût de la moindre information nouvelle.

C'était il y a quatre ans seulement, j'avais 13 ans et j'étais en plein dans ma période rebelle. Si je ne tagguais pas de sigles Anarchy, j'étais en revanche en pleine révolte intérieure contre le monde entier.

Maintenant je suis juste en révolte contre les vieux qui comprennent jamais rien et qui se promènent toujours avec des caddies, les cons parce qu'ils sont idiots, les poussettes ces putain de poussettes de plus en plus volumineuses qui font caddie en même temps, comme si une poussette en elle-même c'était pas déjà le must de l'emmerdement maximum, il faut que ces triples gueux de concepteurs les doublent d'une poche à poireaux, d'un frigo et d'un moteur à réaction ; j'aime pas non plus les enfants parce qu'ils passent leur temps à dire pipi caca lorsqu'ils ne couinent pas parce qu'il fait trop chaud, qu'ils s'ennuient ou que la mère Michelle a perdu son chat, les filles parce que c'est vraiment des manipulatrices, les garçons parce qu'ils ont une bite à la place du cerveau, les français parce qu'ils passent leur temps à se plaindre, les américains parce qu'ils sont obèses, les joueurs de poker, de pétanque, les fans de Mireille Mathieu et les buveurs de pastis parce que c'est vraiment des beaufs, les quadruples buses qui admirent les monochromes, les carrés blancs sur fond blanc, les traits noirs sur fond rouge, les éponges sales sur table bancale ou les néants vides sur immatérialité. J'aime pas non plus les haricots verts, les betteraves, les guitaristes doués parce qu'ils me font complexer, les études parce que j'aime pas travailler, les boites de nuit parce que je ne supporte pas les trémoussements frénétiquement ridicules de personnes imbibées d'alcool et de drogue. J'aime pas les gens parce qu'ils ne peuvent s'empêcher de s'immiscer dans notre vie, à moi, à moi-même et à mon troisième moi.
Et puis j'aime pas Mylène Farmer, d'ailleurs.

Mais après 9mn et 14s de nostalgie, on ne peut s'empêcher de penser qu'à défaut de chanter des trucs profonds et d'être aussi douée en chorés que Kamel Ouali, goddamned qu'est-ce qu'elle est belle et quelle présence elle a…